Le Pianautilus

Au contraire, je me demandais si mon écoute était faussée par avoir commencé avec Argerich les deux fois. Je ne serais pas une bonne juge !!

Mais aucun inconvénient, c'est une version très habitée!
Je ne peux pas dire que j'aie une version préférée, elles sont très différentes (je ne les ai pas encore toutes écoutées), et c'est une musique qui est loin d'être évidente pour moi et que je ne comprends pas bien, donc je ne peux pas préférer ceci ou cela, j'écoute, pleine de curiosité, et ça fera son chemin avec le temps.
(c'est ce qui m'est arrivé avec les Ballades, le scherzo n°2).

J'entends dans la partie chorale, entre les lancées de notes perlées, une réminiscence d'un autre choral, de Mendelssohn (la romance sans paroles op.19 n°4, écrite dix ans plus tôt). Ça me touche beaucoup, surtout dans la version de Kate Liu.

Je vous propose aujourd'hui de partager une de mes dernières découvertes, un vrai petit bijou. Il s'agit des "Quarante variations pour piano" composées en 1930 par le compositeur et organiste français ALAIN Jehan (1911-Mort pour la France à 29 ans, en juin 1940 près de Saumur).

A partir d'un thème très court et relativement banal (4 mesures à 2/4, avec un schéma répétitif de 2 doubles croches-1 croche), le compositeur développe avec maestria (et avec beaucoup d'humour) 40 variations. Je vous laisse découvrir cette œuvre sous les doigts du pianiste Georges Delvallée :




Je connaissais Jehan Alain surtout pour ses œuvres pour orgue. J'en possède une quasi-intégrale réalisée par sa sœur Marie-Claire Alain et parue chez Erato au début des années 2000. Je ne sais pas si on la trouve encore, mais si vous la trouvez, je vous la recommande.


Bonne écoute !

Merci Chantal pour cette découverte. Ce serait comme l'équivalent musical des exercices de style de Queneau.

Merci Chantal pour cette proposition originale.
J'ai parcouru mais cela ne me réconcilie pas pour autant avec cette forme. Les variations c'est pour moi un exercice de style trop scolaire, même avec ce talent et une pointe d'humour... Et pour le côté répétitif je préfère encore écouter des yogi chanter des mantras

Ah tiens, je crois que Lee non plus n'aime pas beaucoup les variations en tant que forme. C'est curieux, moi c'est le contraire, j'aime énormément les variations. Je me demande si ça tient à quelque chose par rapport à la vie, au changement, je ne sais pas. Je vais y réfléchir. Ça m'est arrivé d'aimer une pièce immensément à la première écoute et de ne prendre conscience qu'ensuite qu'il s'agit de Variations: c'est-à-dire que je suis emportée dans le mouvement, pour moi ça "avance", c'est même une avancée puissante, parfois tragique, parfois humoristique; ça ne se répète pas. (bon évidemment dans le morceau de Jehan Alain il n'y a pas vraiment le temps de "varier" autrement que de style et le canevas ne s'efface pas sous la variation).

Bon mémoire, Claudia, c'est exacte, je n'aime pas non plus les variations qui m'assomment avec quelques exceptions découvertes en écoutant de vive oreille, quelques unes de Mompou sur un prélude de Chopin, et plusieurs de Rachmaninoff sur un thème de Corelli...parmi ces exceptions, je ne reconnais pas / plus la mélodie, il semble bien mieux "déguisée" ou complètement transformée.

C'est sûr que les 40 variations de Jehan Alain que je vous ai proposées ont un caractère un peu répétitif donc monotone, mais c'est dû au thème retenu, très simple rythmiquement et harmoniquement, et surtout très court (4 mesures). Mais arriver à en tirer 40 variations, même très courtes, relève pour moi de l'exploit !

Lee a écrit : jeudi 19 juin 2025 23:59 … avec quelques exceptions découvertes en écoutant de vive oreille, quelques unes de Mompou sur un prélude de Chopin, et plusieurs de Rachmaninoff sur un thème de Corelli...parmi ces exceptions, je ne reconnais pas / plus la mélodie, il semble bien mieux "déguisée" ou complètement transformée.

C'est sûr que dans les deux exemples que tu cites, Lee, les thème sont plus longs et plus riches, et le nombre de variations plus restreint. On n'y trouve donc pas (ou moins) cette impression de monotonie que l'on peut ressentir à l'écoute des variations d'Alain. (Dans ses variations sur un thème de Corelli, Rachmaninoff reprend les 16 mesures du thème de la Folia (également pris par Corelli dans sa 12ème sonate pour violon de l'op 5) et en tire 20 variations. Dans ses variations sur un thème de Chopin, Mompou prend comme thème l'intégralité du 7ème prélude, soit 16 mesures et en tire seulement 12 variations).

Mais justement, ce qui fait que j'aime beaucoup les variations en général, c'est le plaisir purement intellectuel de rechercher (et retrouver) le thème, d'essayer de comprendre (un peu à l'écoute mais surtout sur la partition) comment il se transforme au fil des variations.


Une anecdote pour sourire (Source Wikipedia)
A propos de ses Variations "Corelli", voici ce que Rachmaninoff écrivait le 21 décembre 1931 à son ami, le compositeur Nikolai Medtner :
"I've played the Variations about fifteen times, but of these fifteen performances only one was good. The others were sloppy. I can't play my own compositions! And it's so boring! Not once have I played these all in continuity. I was guided by the coughing of the audience. Whenever the coughing would increase, I would skip the next variation. Whenever there was no coughing, I would play them in proper order. In one concert, I don't remember where - some small town - the coughing was so violent that I played only ten variations (out of 20). My best record was set in New York, where I played 18 variations. However, I hope that you will play all of them, and won't "cough"."
Rachmaninoff a enregistré beaucoup de ses œuvres mais jamais ces variations.

Chantal a écrit : vendredi 20 juin 2025 12:11 ce que Rachmaninoff écrivait le 21 décembre 1931 à son ami, le compositeur Nikolai Medtner

Merci pour l'histoire que je ne connaissais pas ! ça alors, il s'ennuyait lui-même.
J'ai jeté un œil à la partition, et il a écrit qu'on pouvait ne pas jouer le 19ème, en plus il a une version alternative. Il était plus permissif à lui-même. En général, pour les concerts publics, les interprètes s'obligent de jouer toutes les variations ?

Lee a écrit : vendredi 20 juin 2025 16:22 En général, pour les concerts publics, les interprètes s'obligent de jouer toutes les variations ?

Oui, dans le cas général un interprète se doit de jouer la partition telle qu'elle est écrite par le compositeur. Dans le cas des Variations Corelli de Rachmaninoff, il pourra bien sûr sauter la 19ème variation puisque le compositeur le permet. Et puisqu'il s'agit d'une œuvre un peu longue, il peut choisir aussi de ne jouer que quelques unes des 20 variations. Mais il faudra qu'il le mentionne dans le programme : "Extraits des Variations sur un thème de Corelli de Rachmaninoff" ou "Variations n°…, … , … extraites des Variations sur un thème de Corelli de Rachmaninoff". Oui, j'ai l'habitude. J'ai organisé par le passé des concerts de musique de chambre et j'étais responsable de la réalisation des programmes