Le Pianautilus

Merci beaucoup Laure pour l'analyse perspicace et détaillée. En lisant je n'ai pas remarqué tous les autres éléments aveugles. J'ai pris du temps de répondre en pensant que j'allais relire encore une fois comme à l'université pour écrire une rédaction mais finalement je t'écris juste comme ça.

Je n'ai pas compris Bartleby aussi bien que vous. Ce qui me dérange est sa lassitude complète avec aucune passion restante. Il est un personnage "plat" - je ne sais pas si on peut dire ça, en anglais en littérature on parle des personnages étant rondes c'est à dire complètes comme des humains ou plats, pas épaissi en caractère, sans les contradictions inhérentes dans la qualité d'être humain. Etant un personnage plat, pour moi Bartleby aussi fascinant soit-il n'est pas convaincant, je ne peux pas imaginer qu'une personne comme lui existait, sauf en devenant fou, en perdant ses capacités mentales progressivement. C'est pourquoi le "Ah humanity!" à la fin ne me parle pas vraiment.

Laure a écrit : ↑mardi 14 avr. 2020 12:56 Je trouve le personnage du patron assez touchant finalement : il fait ce qu’il peut pour échapper à la mélancolie en se raccrochant à la raison, à la morale, pour s’accrocher à la vie. Un humain a-t-il d’autres solutions ? Et je crois que dans l’épilogue (la rumeur sur l’ex emploi de Bartleby au rebut des lettres mortes), il entrevoit presque la vérité mais préfère la mettre au rang des rumeurs, pour se préserver, car la lucidité de Bartleby lui a coûté la vie.

Ma réaction était un peu dans ce sens, mais je sentais qu'il n'a pas suffisamment tout fait pour sauver Bartleby des événements qui l'ont amené à la mort. Il décide de déménager du bâtiment, choisissant ainsi de débarrasser de Bartleby au lieu de prendre les coûts de réputation auprès des clients. Mon sens est que le narrateur sent toujours coupable et est hanté par l'histoire, mais c'est peut-être juste ma projection de mes sentiments sur le personnage.

Laure a écrit : ↑mercredi 15 avr. 2020 18:26 Vincent, tu lis quel Zweig ?

Le monde d’hier.
Passionnant, mais glaçant de parallélismes avec le monde d’aujourd’hui.

J'ai pensé à comment Bartleby ne me semblait pas réel et sur internet j'ai trouvé cet article intéressant :
https://web.archive.org/web/20110107111 ... arcus.html

L'auteur affirme que Bartleby n'est que de l'imagination du narrateur-avocat et c'était une façon pour qu'il gère ou se sépare de ses pensées envahissantes des doutes sur son propre existence dans son travail. Même si je ne suis pas absolument convaincue par cette interprétation, ça explique beaucoup d'éléments dans la nouvelle, comme pourquoi Bartleby n'a aucun histoire, semble ne pouvoir partir du bureau, et n'a qu'un existence parasite avec le narrateur.