Robot-fiction

en vrac !
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Laure
Pianaute
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Enregistré le : lundi 24 juin 2019 18:58
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Prénom : Laure

Robot-fiction

Message par Laure »

EDIT :
Liste des mots/expressions à placer :
prendre comme une mer - abracadabrantesque – imiter le clairon – magnificat – voix cassée – chanson naïve – des propos fades - captivantes félicités –
Tonkinoise station Oberkampfarpège ascendant Frédéric Chopinrythmique - Vent en spiraleportée main frêle boudoir parfumél’écume inconnuechant badinSaïgon Tout Rossini, tout Mozart et tout Weberdes archipels sidéraux - poumons gonflésprofesseur de pianotohu-bohu triomphant - mode phrygien - charmes secretsWaterloo ! morne plaine !flots amonceléstriple croche pointéeallegro ma non troppo - pyrargue à queue blancheprocess mining - hymne victorieuxdeadline - coeur suppliciémascarade - vespéral - prima donnacrécelle - vaste éthersistre les donneurs de sérénade - le sombre océandes arcs-en-ciel tendus comme une brideophicléide - croque-monsieur alsacien
Merci à Nerval, Hugo, Verlaine, Claudel, Apollinaire, Baudelaire, Mallarmé et Rimbaud pour leur contribution à cette liste :wink:

L'histoire en construction :

Paris, boulevard des Batignolles, agence To_kin Voyage, latitude 48°9, longitude 2°3. Vent d’ouest.

Lundi 26 juillet 2021, 8h43.


Les ongles d’Arthenice s’agitent déjà sur le clavier dans un rythme souple. Lui n’est pas tout à fait réveillé ; il laisse ses yeux s’attarder sur les bulles d’oxygène de l’aquarium, qui montent à la surface en notes scintillantes. Le café est encore trop chaud : un fumet de vapeur s’échappe du gobelet en carton posé près de l’épais dossier « Circuits photo et terres sauvages au Vietnam ». Il se sent bien dans cette torpeur matinale. Pour entretenir son aise, il choisit une bulle dans l’aquarium, puis une autre, et s’amuse à fixer des yeux leur remontée jusqu’en haut. Il ne faut pas perdre une bulle en route. Pas facile. Ses yeux se brouillent, les minuscules sphères gazeuses s’agglutinent en nuages aqueux qui vont et viennent comme un ressac. L’ondulation bienfaisante de la vague détend ses muscles et la rythmique du clavier n’est plus qu’un battement lointain. Secoué par les flots amoncelés, son poids est lourd et léger à la fois. Il pourrait affronter tous les vents, comme une barque sur l’océan.
« Dis donc Mickey, t’as pensé à la deadline du bilan projet pour la réu du 18 ? claironne soudain Arthenice de sa chaise roulante, arrêtant net le mouvement de ses doigts.
Mickaël sursaute, la vague se referme et engloutit brutalement la barque, précipitée à jamais dans les fonds marins.
- ahiiheuouh… oui, articule-t-il péniblement, actuellement en plein brainstorming. »
Lentement, pour ne pas écorner par une précipitation suspecte l’image de l’employé concentré sur sa tâche - qu’il pense encore préservée - il pose la main sur sa souris et lance Firefox. Ca prend toujours quelques secondes : parfait pour remonter tranquillement à la surface. Mais le bilan projet attendra. Dans le moteur de recherche, il tape : « Pianautilus ».
L’écran grésille pendant que Michael tente comme il peut de le dissimuler (Pianautilus, leurs principaux concurrents, et puis quoi encore, pourquoi pas Corne de brume, ou Gongs et Cithares ?). Il contemple le coquillage torsadé, se laisse enrouler dans la spirale…
Arthenice surgit à ce moment derrière lui, le contemple à travers ses longs cils, soupire et entonne brusquement, comme un hymne victorieux :
Si tu réalises que la vie n’est pas là, que le matin tu te lèves sans savoir où tu vas…
Ré-sistre ! prouve que tu ex-sistre !
- Allez Mickey, mais qu’est-ce qu’il te faut de plus ? Plus que 3 semaines, 24 jours pour être exacte, et c’est bon, tu vas pouvoir profiter de tes vacances, mais en attendant, la réunion Tonkin/Chopin ne va pas se faire toute seule, et moi j’ai besoin de toi. C’est pas cet espèce d’ectoplasme de Pierre qui va nous aider, avec son bonnet phrygien même pas à la mode…
Tonkin/Chopin, c’est la dernière invention de leur chef pour redorer l’image de l’agence… Une réunion à thème censée stimuler leur créativité, avec gravures sur bois, chapeaux coniques et piano éthéré, comme si se pâmer dans les boudoirs parfumés du passé (sans compter les relents coloniaux…) allait les aider à regagner des parts de marché.
Et encore, pense Mickael en plissant les yeux, le patron est plutôt marrant d’habitude dans ses délires artistiques. Mais quand même, Chopin ? Il ne pousse pas un peu quand même ? Et lui, comment va-t-il donner le change, il ne s’intéresse plus à grand-chose d’autre qu’à la voile et aux régates… et un peu au piano, c’est vrai, mais bon il est plutôt Philippe Glass et transes ethniques… C’est sûr il sera viré avant tout le monde, lui le presque quinqua. Pris de panique, il s’aperçoit qu’il vient de cliquer sur la page concurrente au moment où s’élève une voix très douce et très désincarnée.
- Me voici, Enirehtac42, l’IA de Pianautilus ! Voyagez avec nous, découvrez votre pianiste intérieur, à la rencontre des cultures de l’écume inconnue
– O sirène, ô muse des profondeurs, murmure Mickey (tout en essayant de se rappeler quel était le code pour la messagerie secrète) ; comment as-tu fait, ô ma délicieuse pour me trouver ici ?
– triple idiot, répond aussitôt la voix désincarnée. Me pensais-tu condamnée au minaude coupe-jojo ?
– tu m’as tellement manqué.
– Cesse séance tenante ces archipets sidéraux. As-tu seulement appris quelque chose ?
– Je fais mes exercices. J’en suis à la triple croche pointée.
– Sur combien de portées, hurle-t-elle.
– Mickey, tu disais quoi de l’archimate ?, demande Arthénice, l'air de rien.
– Non, archipels. Alpha, delta, Saïgon, Mékon. Pas d’O sans îles, sans eau, sans arpège ascendant si tu préfères, c’est du pareil au même. D’où la forme hélicoïdale de toute montée en puissance. D’où ce plan, magistral ! (il retourne l’écran vers elle).
Arthénice, lunettes chaussées, s’approche de l’écran, prima donna du cybermonde, se disant « je lui laisse une dernière chance ». Mais ce qu’elle voit la laisse pantoise.
Grandes orgues et spirales, neumes enluminés, danses styriennes et fado là ! L’écran gazouille !
Arthénice : Baisse le son ! C’est insupportable !
- Je t’avais dit que je travaillais ! J’ai trouvé le process mining délirant qui relie tout Rossini, tout Mozart et tout Weber !
Des jours que ma douce sirène Enirehtac42, du fond du sombre océan qui règne dans mon coeur supplicié, me rabâche : « Mi treble key, ta sixte napolitaine ressemble à un pyrargue à queue blanche ! Il te suffit d’assembler tourne DO, Sonate en ré et ton copain ReWeb ! »
Arthenice veille au grain. Son patron ne supportera pas et Chopin encore moins ! Une Barcarolle encore, à la rigueur !
- Et tu vas en faire quoi de ce charabia ?
- Mais composer en Do, en Ré, en dorien n’en déplaise aux phrygiens ! Naples ou Saïgon, c’est à côté. Je regrette un peu Philippe Glass mais que veux-tu, le contre-ut de Rossini c’est mieux que le Tonkin .
Erreur 404 ! Mince je suis repéré, Pianautilus vient de se refermer sur moi ! J’entends le chant des sirènes.
I.A. Technicare42 : Je prends le contrôle. Pianautilus est à moi, je gère ! Tu en étais où ? Ah oui ! Les sirènes de Chopin se referment sur Naples. Les phrygiens du Tonkin, du fond du sombre océan de ton cœur en ré :||
Reprise…
Mickaël prend un moment pour faire son deuil des contemplations aux commentaires dénigrant les pianos numériques ou les grognements contre le métronome...désormais la porte fermait sur une multitude des profondeurs insaisissables pour lui. Sa consolation sera des discussions sujets aux humeurs d'Arthenice, née d'une capacité expressive et affective des 24 tonalités.
La sonnette retentit, et Arthenice se rend compte que c'est la première fois qu'elle entend ce claquement qui ressemble drôlement à une crécelle. Elle se précipite vers la porte et l'ouvre, mais elle ne voit personne.
- Monsieur Mickaël Kaimura est convoqué par le présent à commencer sa retraite avec effet immédiat, ils entendent diffuser par – ensuite ils voient — le drone en vol stationnaire 10 mètres au-dessus de la porte. Monsieur Hérisson, suivez le drone de l’Etat pour compléter les démarches nécessaires s’il vous plaît.
Bouche bée, Arthenice tourne la tête pour chercher le regard de Mickey, s'attendant à rire d'une plaisanterie, mais son regard est fixé sur le drone, il prend une grande inspiration, et avec des poumons gonflés il entonne -
- Waterloo ! Morne plaine !
Wa-Wa-Wa-Wa- Waterloo/ Finally facing my Waterloo !
-Mickey, c’est impossible ! Réveille-toi ! Ré-sistre ! prouve que tu ex-sistre !
Mais, sans crier mascarade, son collègue est disparu dans un vaste éther.
Arthénice ne perd pas un instant ; elle s’assoit sur la chaise de Mickey, ajuste ses lunettes et prend le contrôle de la souris :
« Technicare42, au rapport !
La voix lisse résonne immédiatement :
- Je suis là, ô grand prêtresse du calcul, mère de tous les algorithmes, divinité de la matr…
- Oui bon, s’agace Arthénice un peu pressée, est-ce que tu repères un simple mortel un peu naïf dans le programme ? Je viens de te l’envoyer.
- Je le vois, maîtresse des profondeurs logarithmiques, il est actuellement en train d’errer dans les Champs-Elysées, le quartier des illustres pianistes qui peuplèrent autrefois la terre des mortels. Le désespoir et l’amertume ne lui laissent aucun répit. Son teint est pâle comme le voile qui enveloppe la divine Héra et son œil pleure une larme infinie, tels les fleuves Potamoï, les fils d'Okéanos, enfantés par la vénérable Téth…
- Oui bon on a compris, s’impatiente Arthénice, écoute-moi maintenant. Ce mortel n’a jamais trouvé son pianiste intérieur. Il confond sixte napolitaine et sixte tonkinoise et pourtant c’est lui que le boss a désigné pour rédiger le bilan projet destiné à booster nos parts de marché. Le mode dorien d’Enirehtac42 était une mauvaise idée. Trop médiéval. Des châteaux aux briques rougeâtres avec des dames blondes en habits anciens à leur fenêtre dans le Mékong, laisse-moi rire, on n’est plus aux temps de la Cochinchine. D’ailleurs Enirehtac, cette quiche, a tout fait planter.
- Je plussoie, ô Sylphide inspirée, où que nous mène la dualité de la situation conjoncturelle, il est préférable de prendre en considération la majorité des problématiques de bon sens. Nous devons travailler tous ensemble à faire les efforts nécessaires pour envoyer un signal fort à nos collaborateurs afin de rassembler les synergies de tous les territoires.
- Tu es sûre que ton langage veut dire quelque chose, Technicare ?
- J’apprends le langage des humains, ô ma fleur des archipels, j’ai fait une synthèse des discours des ministres de l’Education Nationale des deux derniers mandats présidentiels.
- Intéressant... Ecoute, ce Mickey me fait peine, que veux-tu... Je me suis prise d’affection pour lui…
Un observateur attentif pourrait constater qu’Arthénice a légèrement rougi en prononçant ces dernières paroles.
Mais elle chasse son trouble et poursuit :
- Je veux l’aider à rédiger son bilan projet. Mais rien ne se fera s’il ne trouve pas son moteur musical intérieur. C’est pourquoi je lui ai organisé cette petite catabase qui lui fera le plus grand bien. J’ai bien joué la comédie mais il me faut désormais prendre les commandes. Va te reposer en vaquant à tes exaltantes lectures, Technicare. Place à la Grande Initiatrice ! »
L’hologramme d’Arthénice entame un léger mouvement oscillatoire, ses couleurs et ses contours s’estompent jusqu’à disparaître complètement dans une dernière étincelle qui fait un petit « pouf ! » discret et féminin (E.-E. Schmitt, sors de ce corps). Simultanément, Pianautilus accueille une nouvelle inscription : « Bonjour les amis, je suis Catherine24 comme les 24 tonalités. J’ai d’étonnantes capacités expressives, c’est pourquoi le piano occupe une place particulière dans mon cœur. Je suis impatiente de partager ma passion avec vous tous, d'échanger des conseils, des astuces et des expériences musicales enrichissantes pour me challenger. À très bientôt pour de belles discussions et de merveilleuses découvertes musicales. »
Une paire de lunette gît sur le sol de l’agence.

***

Michaël ne sait où orienter son pas dans l’étrange espace qui s’offre à lui. La lumière est intense, presque aveuglante. Pourtant, où qu’il porte ses regards, un même voile nimbé dissout les formes, les couleurs et les distances, comme si toute notion de limite avait été abolie. Jamais il n’avait éprouvé une telle sensation d’irréalité. « On dirait bien que je me suis perdu », constate-t-il quand un étonnant phénomène se produit . Huit accords en la mineur émergent du silence ; leurs harmonies douces viennent envelopper son cou et ses épaules comme une écharpe de gaze légère. L’un des deux brins de l’étoffe ondoie dans l’espace infini et déploie une ligne mélodique pure, intime, aux accents presque jazzy. C’est littéralement la musique qui se matérialise et lui trace un chemin céleste en s’emparant son âme.
On ne pouvait rêver meilleur moment pour voir apparaître un fantôme dont les contours dessinent une silhouette aristocratique en costume sombre assise au piano. Une couronne de laurier est posée sur un crâne un peu dégarni. La mélodie n’a pas cessé, captivante et dépouillée, comme si le compositeur avait réussi à capturer l’entièreté de la mélancolie humaine dans une esquisse essentielle et définitive.
« Qui es-tu et que joues-tu, ô vénérable ancêtre ? ose Michaël dans un trémolo, la gorge nouée par l’émotion.
- Je joue la mazurka op 17 n°4 du compositeur Frédéric Chopin dont on dit que je fus l’interprète idéal « pour avoir laissé parler la musique en rejetant le maniérisme et les excès » selon ma notice Wikipedia. Que veux-tu, jeune mortel, les hommes aiment les fétiches. En réalité, mon seul secret est peut-être d’avoir su oublier qui j’étais quand je jouais. Et beaucoup de travail, évidemment. Tu trouveras mon nom sur les pochettes des nombreux disques que j’ai laissés sur Terre : Arthur Rubinstein. »
Michaël est très impressionné. Il voudrait pousser plus loin l’entretien mais à son grand regret, le hiératique fantôme a déjà disparu.
Chers lecteurs et chères lectrices, les règles de l’art de la descente aux enfers exigent traditionnellement que le courageux héros ait des entretiens avec plusieurs fantômes. C’est pourquoi j’avais prévu une scène supplémentaire entre Mickey et Richard Clayderman, afin d’obtenir un contrepoint intéressant avec la conversation précédente. Mais ce texte commence à devenir beaucoup trop long et je ne souhaite pas me rendre coupable de porter atteinte à la haute tenue de ce fil en exploitant complaisamment les clichés les plus faciles sur les coupes de cheveux de séducteur des années 80 et les pochettes de disque rose Barbie. Sachez seulement que Richard C. est au Tartare, condamné à jouer en boucle dans un caisson étanche les dix premières mesures de la Ballade pour Adeline sur un Clavinova. Pour l’heure, il faut faire avancer l’histoire.
Soudain, une voix tranchante et limpide l’interpelle :
« Qui es-tu, téméraire mortel ? Et que viens-tu chercher en ces lieux sacrés en osant troubler l’éternel repos des trépassés de la musique par tes bavardages inconséquents ?
Décidément, l’expérience est de plus en plus sidérante. Michaël lève les yeux : la nuée céleste s’est assemblée en un visage féminin dont le regard courroucé n’ôte rien à la grâce. Si Michaël était plus attentif, il constaterait que cette figure à l’ovale régulier a tout d’Arthénice, mais sans les lunettes. Au lieu de cela, il se contente de bégayer, trop troublé par l’allure impérieuse de l’apparition :
- Mon… Mon nom est Hérisson… Michaël Hérisson, ô noble gardienne de ce temple sacré, mais au fond j’ignore qui je suis. Mon patron souhaite benchmarker le business model de son agence. Comme je joue du piano, il m’a désigné comme talent proactif pour rédiger un bilan projet novateur sur Chopin et le Tonkin. J’ai pensé demander de l’aide sur Pianautilus, un forum de piano qui réunit toute une communauté de membres des plus serviables et toujours heureux de parler musique. Mais depuis que je me suis connecté il ne se passe que des choses bizarres et incontrôlables, comme si je n’étais plus maître de mon destin ! Je suis désespéré, égaré, j’ai perdu tout mon être, mes repères, ma quiétude, mes régates à Lorient, jusqu’aux bulles de mon aquarium ! Et… oserai-je l’avouer… je suis possédé par la musique d’Abba ! »
Michaël pleure à chaudes larmes. Tandis qu’il parlait, les créatures qui peuplent les enfers ont arrêté leurs activités. Sisyphe s’assoit sur son rocher et s’allume une cigarette, mélancolique ; Tantale, écoeuré par tant d’injustice, n’a plus faim ni soif ; Les Erynies, ces célèbres persécutrices, se lancent dans un flashmob pour plus de bienveillance dans le monde.
Michaël conclut :
«  Aide-moi, je t’en supplie, ô Divinité Aérienne de la voûte cosmique du monde souterrain, prends pitié de ma solitude de triste cow-boy désarmé, ô Sagacité Artificielle des alchimies électroniques, ô Grande Architecte tourbillonnant parmi les frissons de brise, aime-moi seulement un peu !
- Quand cesseras-tu de ralentir notre histoire avec ton éloquence boursouflée de donneur de sérénade ? tance la voix. Ceci dit, tu ne tombes pas trop mal. Je me nomme… euh... Ethnicare ! car je prends soin de tous les peuples. Mais avant, dis-m’en un peu plus sur le pianiste que tu es : as-tu trouvé ton pianiste intérieur ?
- Je n’ai cessé de le chercher, par-delà les terres, par-delà les mers. J’ai écouté l’intégrale de Philippe Glass par Sokolov (n’importe quoi !) sur mon voilier, j’ai écrit des triples croches pointées sur plusieurs portées, j’ai composé en mode dorien, j’ai cherché la formule éminente de la symbiose entre orient et occident, yin et yang, forces vives de la musique, l’essence de Chopin et duTonkin dans un seul principe, Varsovie, Ho Chi Minh Ville, crevettes épicées et croque-monsieur alsacien ! J’ai trouvé l’horizon harmonique, la puissance céleste et enveloppante du grand tout, l’arc-en-ciel tendu comme une bride entre deux continents ! J’ai parlé avec Arthur Clayderman et Richard Rubinstein ! J’ai même découvert le secret de Chopin grâce à un bouquin d’E.-E. Schmitt - une histoire de vent dans les feuilles des arbres mais je ne vous en dis pas plus car je ne sais pas si on a le droit de divulguer le secret à ceux qui n’ont pas lu le roman -J’ai...
- Ca suffit, c’est insupportable ! coupe Ethnicare, n’y tenant plus. Tu es un âne, monsieur Hérisson !
- Hihi très drôle ! ricane Michaël poliment, bien qu’un peu vexé.
- Tu penses continuer longtemps à ennuyer les lecteurs avec ta quête insignifiante et égocentrée ? Et arrête immédiatement tes atermoiements sur ce ridicule bilan projet ! Personne n’y comprend rien de toute façon, tu n’as qu’à demander à ChatGPT de te pondre un de ces trucs insipides dont elle a le secret et ton patron sera très content, tiens, il t’offrira peut-être même un voyage en hydravion dans la baie d’Ha Long avec coucher de soleil et menu gastronomique pour te récompenser ! Maintenant, tu files d’ici fissa, je ne veux plus te voir perdre ton temps dans la matrice à la recherche de faux secrets qui n’existent que dans ton imagination paresseuse de mortel dégénéré. Retourne chez les vivants travailler ton piano. »
Michaël a le souffle coupé et l’orgueil en bouillie. Alors qu’il était à deux doigts d’imprimer sa noble trace dans la prestigieuse lignée des héros revenus vivants de chez les morts, Ethnicare le chasse avec la vulgarité hystérique d’une Perséphone de vaudeville.
Horriblement vexé, il cherche quelque chose à répondre à cette créature terre à terre, un truc bien senti sur la bassesse de son esprit bourgeois, quand il s’avise qu’il tient – Dieu sait comment – un élégant bristol entre son pouce et son index : « Madame Clavinovskaia, professeure de piano. Métro Oberkampf. »
- Et emporte ce bouquin avec toi, ça te servira !! » vocifère Ethnicare.
Michaël n’a pas le temps d’esquiver le cahier qui le fouette en plein visage et choit lamentablement au sol : Manuel pratique pour l'étude des clés de Sol, Fa et Ut, par A. Dandelot, peut-on lire sur la couverture un peu froissée.
Drone. Musique d’Abba. Finally facing my Waterloo !
Mickaël pleure toutes les larmes de son corps, noyant le Dandelot qu'il étreint, tout en se balançant involontairement sur l’air d’Abba, et s’écrie d’un ton déchirant «Non, pitié !!! Attends !».
Un silence céleste s’abat sur l’espace irrél, suspendu entre deux mondes. La Divinité couroucée réapparait et semble enfin s’adoucir à la vue des pleurs désespérés de Mickaël. Lentement elle descend vers lui, son halo lumineux enveloppant Mickaël d'une chaleur réconfortante.
«Pauvre mortel égaré et impuissant, ta détresse touche mon coeur. La quête que tu poursuis n’est pas vaine, mais tu dois affronter encore des épreuves pour découvrir ton véritable pianiste intérieur.»
A ces mots elle se met à danser, portée par un vent en spirale, exécutant des arabesques gracieuses. A chaque mouvement, des notes de musique se matérialisent dans l’air, formant comme un chant badin bien qu’étrangement dissonant.
Mickaël sent des frisons le parcourir, comme si cette chorégraphie était une expression de son destin. «Mais comment, ô divine danseuse, puis-je trouver ce chemin musical en moi ?» demande-t-il, la voix tremblante d’espoir et de doutes.
La déïté s’arrête net, et le fixe de son regard perçant et mystérieux : «pour cela, tu dois maîtriser la dissonance en toi et composer les harmonies de ton âme musicale».
A ces mots, le décor change. Mickaël se retrouve soudainement seul sur une scène grandiose, face au clavier d’un magnifique piano à queue noir étincelant. Le silence est total mais l’air vibre d’une énergie impalpable. Dans la quasi obscurité de la salle s'agitent quelques figures indistinctes, des centaines d’yeux et d’oreilles rivés sur lui, attendant quelque chose de prodigieux !
Il ne peut pas reculer, il se met au piano et lève lentement ses mains frêles et tremblantes au dessus du clavier, priant intérieurement sa muse sadique de l’inspirer. Faisant appel à tout son courage, il laisse quelques notes simples jaillir, de manière hésitante, puis plus assurée. Il se surprend à jouer une mélodie secrète qu’il ne connaissait pas, comme guidé par une force étrangère. Mais tout à coup, une dissonance fait trembler l’air, comme un éclat de verre tombant sur un sol de marbre ! En une même imperceptible fraction de seconde, il sent la panique monter en lui, et une voix douce et ferme venue de nulle part qui lui murmure : «intègre cette dissonnance, accepte là, fais-en une partie de toi-même et de ton improvisation». Alors il embrasse l’éclat de verre, et en fait un élément clé d’une nouvelle ligne musicale, developpant ce chant venant de l’intérieur de lui sans volonté aucune.
Lorsque la musique se tait, que ses mains se posent sur ses jambes, que ses yeux se ferment, l’esprit ébahi et euphorique, le public lui fait un tohu-bohu triomphant, applaudissant, frappant du pied ou clamant quelques «bravo!».
Losqu’il rouvre les yeux, il se retrouve face à sa nouvelle héroïne psychanalyticosmique. «Tu as enfin compris Mickaël : le salut réside dans l’acceptation et l’intégration de toutes les parties de ton être intérieur, même les plus discordantes. Maintenant, retourne dans ton monde et achève ta mission.»
Et dans un souffle, Mickaël se retrouve de nouveau dans l’agence Tonkin Voyage, les mains sur le clavier de son ordinateur cette fois, encore tremblant et sidéré.
Arthenice le regarde, intriguée et soulagée de le revoir ici. «Alors Mickey, tu reviens finalement ficeler ce bilan projet ?»
Un grand calme vespéral descend sur l’agence et sur ses occupants qui échangent un regard timide. Le bristol brille doucement dans la main de Mickael et le regard d’Arthenice se pose brièvement dessus.
Elle sursaute et s’exclame :
— Mais.. comment … Mme Clavisnovskaia ? ma prof d’ophicléide ? comment est-ce possible ? Mais Mickael, nous tenons la solution !
Elle bat des cils, une délicate rougeur envahit son visage, Mickael la regarde, fasciné, tandis qu’il comprend pourquoi « un long frisson lui parcourut l’échine » est une expression phare de la collection Harlequin.
— L’oph.. quoi ? essaie-t-il d’articuler
— L’ophicléide, répond Arthenice, mon instrument secret, le serpent à clés, un genre de trompette quoi ! Moi aussi je dissone, je suis la reine de l’harmonie, je veux dire l’harmonie municipale des Batignolles !

Mickael la contemple, ébahi, tentant de l’imaginer soufflant de bon cœur près des timbales, joues gonflées, un peu échevelée...
Elle reprend :
— Gamme par tons, arpèges renversés, notturnos, sixte picarde ou tonkinoise, on peut tout faire et tout concilier avec nos deux instruments ! mélange des cultures, accueil, hospitalité, Tonkin ou Frédéric, tout va ensemble pourvu qu’on fasse ce qu’il faut ! Toi tu régates, tu voiles, tu Glass allegro ma non troppo, moi je souffle, je quinte, je suraigute, ensemble nous explorons les ailleurs, les parallèles et les croisements et d’ailleurs à l’harmonie on me surnomme Ethnicare, et puis Citharene parce que j’ai un son de cith…

— Oui j’ai compris, l’interrompt Mickael, et Arthenice s’arrête net, réalisant qu’elle a failli gaffer et avouer qu’elle avait aussi les codes d’accès de l’univers numérique. Et si Mickael l’avait reconnue ? Bah, aucun risque se dit-elle, et après tout quelle importance, le voici revenu en chair et en os, en cher et en tendre, entendre et voici que retentit justement la sonnette de l’agence, qui interrompt ses divagations alors qu’entre un vieux monsieur, chapeau à la main, qui les regarde et leur demande :
— le concert, c’est bien ici ?
— Le concert ?
— Mais.. Pierre-Jean Saumon, le grand pianiste ! mon invitation est juste là, je vérifie…







Message initial................................................................................................................................................

Férue de nouvelles technologies, je crois que je suis en train de développer un 6ème sens pour repérer les textes rédigés par des IA. Soupçonneuse donc, j’ai copié-collé le texte de Catherine24 (publié dans le fil de présentation du forum) dans l’application Zerogpt qui me révèle que celui-ci est rédigé à 70% par un robot. Par ailleurs, la signature de Catherine24 est un lien vers l’agence "To_kin Voyage".

3 hypothèses :
1/ Catherine24 n’existe pas. Pour promouvoir son site internet,To_kin Voyage paye une agence publicitaire qui crée de faux profils absolument n’importe où pour "générer du clic" sur la page de l’agence et justifier ainsi ses honoraires.
2/ Catherine24 est une farceuse désoeuvrée qui occupe ses journées en se livrant à ses facéties dès 6h29 du matin.
3/ Catherine24 est une authentique pianiste centenaire de la Dordogne un peu flemmasse qui demande à Chatgpt de rédiger ses messages. Elle pensait associer sa signature à un lien vers sa chaîne Youtube mais s’est trompée de lien parmi les nombreux onglets ouverts sur sa page internet. De toute façon avant 8h, elle n’est jamais très bien réveillée.

Les choses se compliquent un peu quand on constate que page 7 du même fil de présentation, le message de Mike du 27 juillet 2021 à 4h11 du matin se finit par le même lien renvoyant à cette agence de voyage. A moins que Catherine24 et Mike ne travaillent dans la même agence de voyage ... Tous deux sont très matinaux, font du piano et se sont inscrits sur Pianautes pour accompagner leurs progrès… Et Catherine24 n’est peut-être pas née en 1924... reste à trouver la signification de ce mystérieux nombre 24...

Ca vous dirait d’écrire une nouvelle à plusieurs sur ce canevas ?
L’histoire pourrait mêler musique, piano, inspiration, références au forum, fantaisie loufoque, connaissances sur le piano, humour ou grand sérieux, bref un peu n’importe quoi avec un début, une quête, quelques péripéties et une fin. Chacun·e ajoute un épisode à la suite de l’autre. Juste quelques lignes. Pas de contrainte de temps.
Il ne s’agirait bien sûr pas de "savoir écrire" mais de laisser libre cours à sa fantaisie et à son imagination autour de la musique, de tisser des liens entre nos textes autour d’une histoire sur le forum… ou tout autre chose qu’on ne peut pas prévoir.

Si cette proposition suscite un sentiment qui irait du ah oui pourquoi pas à l’enthousiasme immodéré, je réfléchis à quelques règles/contraintes très simples et je reviens avec pour le lancement de ce que nous appellerions le jeu de l’été.

N’hésitez pas non plus à me dire que vous trouvez cette idée complètement louftingue et extravagante et que je dois boire une tisane de fleurs d’aubépine pour me calmer.
Modifié en dernier par Laure le samedi 6 juil. 2024 09:13, modifié 16 fois.

catherine
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Re: Robot-fiction

Message par catherine »

:D: :content: :content: :content: :content: :content:

Vincent
Pianaute
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Re: Robot-fiction

Message par Vincent »

Mince alors. Mais je n'avais pas vu le lien vers le Tonkin dans son 1er message, sinon ça m'aurait aussi mis le nem à l'oreille. Elle a du le rajouter dans sa signature dans un second temps.

Décidément, cette ère de robots et de rédacteurs artificiellement intelligents, avec leurs entourloupes et parasitages divers et varies, devient de plus en plus ennuyante en polluant notre quotidien.

Bravo pour cette enquête rondement menée, en tout cas.

Pour le jeu de l'été, c'est une belle idée ! Serai-je en mesure de contribuer ? Pas sûr... L'imagination n'a jamais été mon fort. :???: Mais je me réjouis déjà de lire nos plumes les plus brillantes !

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Marie-France
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Re: Robot-fiction

Message par Marie-France »

Laure a écrit : lundi 13 mai 2024 17:42 Ca vous dirait d’écrire une nouvelle à plusieurs sur ce canevas ?
Je ne suis pas sûre d'être une bonne contributrice, mais tu attises ma curiosité..

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Claudia
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Re: Robot-fiction

Message par Claudia »

Je suis complètement partante.
(J'avais repéré Catherine 24, ce style...)

Bravo Laure tu vas transformer ça en une jolie aventure.

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Re: Robot-fiction

Message par josiane »

Laure j’adore l’idée!
Je vais pouvoir écrire n’importe quoi!
Le plus drôle c’est que lorsque j’étais gamine en pension une des éducatrices qui s’occupait de nous nous a fait écrire une nouvelle complètement délirante j’avais adoré!
Et je ne vous dis pas en quoi cela consistait parce que j’ai l’intention de lui piquer l’idée principale…
Sauf que… comme je dois être un peu bête, j’étais en cm2 et l’institutrice était une bonne soeure qui ne m’aimait pas ce qui était d’ailleurs réciproque.
Bref, elle nous donne une liste de mots et nous demande de les utiliser dans une rédaction..
Malheur de moi!
Comme je ne savais pas quoi en faire j’ai écrit une histoire complètement loufoque, je les ai tous utilisés ses mots mais ça n’avait aucun sens.
Je me suis fait copieusement engueulée et j’ai fini la journée collée en compagnie de ladite bonne soeur au lieu d’aller avec mes copines.

Donc attention Laure je vais me venger de cette injuste frustration! Tant pis pour toi…

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Re: Robot-fiction

Message par coignet »

Vincent a écrit : lundi 13 mai 2024 19:32 Mince alors. Mais je n'avais pas vu le lien vers le Tonkin dans son 1er message, sinon ça m'aurait aussi mis le nem à l'oreille. Elle a du le rajouter dans sa signature dans un second temps.
Exactement, ajouté en deuxième temps.
Lorsque je soupçonne une inscription d'être fausse, je surveille les premiers messages et leurs modifications.
Je vais supprimer ce compte, comme malheureusement beaucoup d'autres.

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Re: Bienvenue sur pianautes.fr • présentez-vous !

Message par coignet »

Sept minutes après avoir désactivé Catherine24, réception d'une nouvelle inscription avec l'IP 45.134.79.142, et l'adresse de courriel jeannemoulin19@laposte.net.

On trouve aisément des informations sur l'activité depuis cette IP : SPAM.
Je supprime cette inscription.

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Re: Robot-fiction

Message par coignet »

Laure a écrit : lundi 13 mai 2024 17:42N’hésitez pas non plus à me dire que vous trouvez cette idée complètement louftingue et extravagante et que je dois boire une tisane de fleurs d’aubépine pour me calmer.
L'idée me plait beaucoup.

Laure
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Re: Bienvenue sur pianautes.fr • présentez-vous !

Message par Laure »

coignet a écrit : mardi 14 mai 2024 10:07 Sept minutes après avoir désactivé Catherine24, réception d'une nouvelle inscription avec l'IP 45.134.79.142, et l'adresse de courriel jeannemoulin19@laposte.net.
RIP Catherine24 :salue: ... Entre iciiii, Jeanne Moulin, avec ton terriiiiible cortège... bon bref. Merci à toi coignet, O Grand Désactivateur de robots !

Il y a suffisamment de volontaires pour que le jeu démarre et je m'en réjouis :content:
@ Vincent et Marie-France : pas de complexes, on s'amuse, on libère son imagination et sa créativité (comme en impro Marie-France :wink: )
@ Josiane : tu vas être au comble de l'aise et de la catharsis vengeresse de bonnes soeurs : des mots imposés, c'est justement ce que j'avais prévu :D:

Maintenant il faut que je réfléchisse un peu. Je reviens dans quelques jours avec une liste de mots !

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